Il y a presque 10 ans, on faisait un constat assez étonnant concernant la terre battue en France. A l’époque, l’expertise de Bruno Renoult, président de l’ADTB (voir ci-dessous), nous avait beaucoup servi.
Aujourd’hui, il est donc logique de refaire un point avec lui.
Depuis notre enquête dans le GrandChelem n°8, y a-t’il eu une amélioration dans le développement des courts en terre battue en France ?
Aujourd’hui, 13% des courts (affiliés FFT) sont en terre battue. Même si on ajoute quelques terrains privés, on n’atteindra pas 14%. Donc, pas d’amélioration! Les courts en “terre artificielle” (voir nomenclature) qui en étaient à leurs balbutiements il y a 10 ans ont pris leur essor puisqu’ils représentent 3% (pas loin de 1000 courts) en France. Même s’ils sont plus chers, s’ils nécessitent au moins autant d’entretien, et s’ils sont moins confortables que les courts terre battue, c’est toujours mieux que le béton !
On parle beaucoup du club, comme point de départ de la pratique, est-ce qu’il ne faudra pas faire un gros effort pour que certaines structures puissent s’offrir de la terre battue ?
Oui ! Il faudrait d’abord faire disparaître progressivement les clubs de 1 ou 2 courts qui ne sont pas viables et qui empêchent les autres de bien vivre. Mais la FFT ne veut pas car elle perdrait des licenciés dans un premier temps. Il faudrait 5000 clubs de 6 courts en moyenne. Mais ce n’est pas seulement la responsabilité de la FFT mais aussi celles des clubs. La quasi-totalité des clubs français gèrent des installations publiques. Mais ils ne devraient pas accepter que la municipalité limite le prix des cotisations. La moyenne française est de 92 € pour un abonnement à l’année. C’est évidemment trop peu pour avoir de beaux vestiaires, un club-house attractif et des installations sportives bien entretenues.
Le principal défaut de la terre battue c’est l’idée qu’elle coûte cher à entretenir et qu’elle n’est pas utilisée toute l’année ?
Toutes les surfaces ont besoin d’être entretenues. La terre battue plus que les surfaces dures. L’entretien quotidien, passage de la traîne, balayage des lignes et arrosage l’été en journée, doit être fait par les membres. Les courts doivent être noyés tous les soirs quand il n’a pas plu dans la journée; c’est difficile de le faire faire par les membres et même par un bénévole. La réfection printanière coûte cher, 2000€, et elle s’amortit mieux avec plusieurs courts. A partir de 20 ans (durée de vie d’un court en dur) la TB aura coûté moins cher qu’un court en dur ou qu’une terre artificielle malgré le prix de l’entretien. En France aucun court n’est utilisé toute l’année. A Bordeaux, à cause de la météo, on joue chaque année 200 jours (55%) sur TB extérieure et 240 jours (66%) sur résine extérieure. Cela ne fait pas beaucoup de différence!
Comment expliques-tu que la France soit autant à la traine par rapport aux pays européens dans l’équipement de terre battue.
Il y a 3 raisons:
– l’opération « 5000 courts » dans les années 80 qui a favorisé la construction des courts (la plupart en béton) dans beaucoup trop de communes françaises.
– il y a 36000 communes en France (11000 en Allemagne, 8000 en Espagne, 7000 en Italie) et elles veulent toutes leur court de tennis. Et quand on ne construit qu’un court ou deux, il vaut mieux faire du dur que de la TB car c’est difficile d’en amortir le coût d’entretien.
– le tennis est à 90% public en France et ça limite le montant des cotisations. D’autre part, les communes veulent bien taper dans le budget d’investissement (construction) mais pas dans le budget de fonctionnement (entretien). Alors ils font construire des courts chers en dur. C’est un mauvais investissement mais les maires restent en moyenne moins de 10 ans en place, ne voient donc pas le court pourrir et n’ont pas à le remplacer.
C’est quoi l’ADTB ?
L’Association pour le Développement de la Terre Battue (ADTB) a été créée en juillet 1985 par Yves MERCIER, kinésithérapeute du sport et Bruno RENOULT, ancien joueur de tennis professionnel. Sa mission: informer pour convaincre que la terre battue est la meilleure surface pour pratiquer le tennis. Ses arguments : elle est la meilleure pour la santé et la moins chère à long terme.
Laurent Trupiano Extrait du Magazine ‘GrandChelem’ – avril 2017